vendredi 28 novembre 2008

Un vilebrequin dans le ragoût, ça lui donnera du goût

Ceux qui me connaissent bien savent que je suis une grande fan de Thomas Fersen. Ceux qui me connaissent davantage savent également que je suis une groupie finie de Fred Fortin, enfin presque, je ne connais pas toutes ses chansons par coeur, comparativement à celles de Tomas Fersen. Parce qu’elles me vont droit au coeur, paradoxalement, les chansons de Fred, je les écoute moins souvent. L’association de Fred et Thomas sur l’album Trois petits tours n’allait pas de soi pour moi, d’ailleurs durant les 2-3 premières écoutes de l’album, je me suis demandé d’où venait cette musique étrange, oscillant constamment entre le totalement fucké et la fanfaronnade... À ce moment-là, je savais que Fred avait réalisé l’album, mais pas qu’il avait eu carte blanche pour les arrangements. Bref, quand je l’ai su, j’ai prononcé un gros «oh yeah» à l’intérieur de moi-même : il était déjà impératif que j’aille voir le nouveau spectacle de Fersen aux Folies Bergères, en extra j’allais aussi voir Fred jouer de la basse. Deux de mes idoles réunies, c’était inespéré et inattendu. J’allais bel et bien triper fort le soir du 27 novembre 2008.

Le show commence, Thomas Fersen arrive sur scène, fidèle à lui-même et à son style déjanté, vêtu d’une robe, d’un veston noir et d’un haut de forme à plume de coq ; fait une dizaine de chansons. C’est un peu trop relax à mon goût pour le moment, mais j’ai confiance que ça ne saurait durer : Fersen, c’est la version animée de Jack in the box. Soudain, un grand noir sur la scène, le noir comme je l’aime dans les salles de spectacle, le dimmer énergisant de la musique live, le gingembre mariné entre deux bouchées de poisson cru, le noir qui nous laisse nous rendre compte combien on apprécie, qui nous permet parfois de filer en douce, mais qui la plupart du temps, nous prépare mentalement à en prendre plein la gueule. Subitement, gros spot sur mon Fred qui a troqué sa basse pour une guit’, Fersen a disparu. Les accords me disent quelque chose, puis «Ma vie est une simple histoire, je suis tel sont mes parents. Ma mère vendait des bouteilles et mon père buvait tout le temps..


Le coeur m’a arrêté.

C’est dur d’expliquer l’effet que ça m’a fait : un mélange d’égarement, de mélancolie, de fierté, de merci-la-vie, et de crisse-que-ça-fitte-pas-mais-c’est-bon-pareil. C’était la première fois que j’entendais cette chanson-là en spectacle sans que personne du public ne la chante (sauf moi). Bizarre. Ça doit faire encore plus bizarre à Fred de chanter une toune qui a plus de 10 ans devant un public étranger à sa musique. Mais ils ont tendu l’oreille, les Français, et ont applaudi chaleureusement son talent. Je me suis dit que la formule allait être plus que gagnante lors de la tournée au Québec. N’empêche, malgré moi, je me suis senti comme une imposteure tout le reste du show. Mon amour pour le produit québécois est exponentiel depuis que je suis ici. Voir Fersen et Fortin sur la même scène, c’était comme être amoureuse de deux personnes à la fois et ne vouloir être infidèle ni à l’un, ni à l’autre. Un dilemme à la hauteur d’un exil que j’aimerai si fort, que je l’étranglerai.

lundi 24 novembre 2008

Emplois du temps

Je pense que j’ai trouvé la (ma) formule gagnante pour écrire : alterner les lieux. Si dans la vie en général je suis incapable de rester en place, logiquement, il faut que je bouge pour pouvoir garder un bon rythme d’écriture. Je pars un matin sur deux à Paris, je m’arrête dans un café et l’après-midi je vais à la bibliothèque publique d’information (la seule bibliothèque que je connais où il faut faire la queue... pour passer au détecteur de métal), celle de Beaubourg, qui me rappelle franchement la BNQ à Montréal (il y a des clôtures tout le tour), bien que son architecture soit un peu plus originale, disons. Étrangement, le principal avantage de cette bibliothèque, c’est qu’on ne peut pas emprunter les livres : ils sont toujours là quand j’en ai besoin. Le deuxième avantage, c’est que j’ai l’impression d’avoir des amis intellectuels, je me sens moins tu-seule de ma gang... ça fait un peu Soulier de Satin, à 9 heure, le 2 décembre, où 10 personnes se sont ramassés là, tout poqués, pour travailler, tout le monde est dans le jus, on boit du café en gang en regardant nos ordis, on se parle pas, mais maudit qu’on est ben pareil, Walid arrive et chiale sur le fait que le local étudiant est devenu un repère d’intellos branchés... c’est comme ça que je me sens à Beaubourg, moins le café. Évidemment, cette époque est révolue, du moins en ce qui me concerne. Maintenant, j’ai d’autres amis, en d’autres lieux, tous aussi bizarres les uns que les autres.

Il y a deux sortes de personnes qui viennent, comme moi, étudier à la Bpi : les statiques et les dynamiques. C’est quand même spécial que, peu importe la bibliothèque, tout le monde semble toujours aller s’asseoir à la même place... À ma table, il y a un gars qui semble souffrir d’une sorte de dystrophie musculaire et qui semble apprendre une langue étrangère. Il est cool, ben tranquille (même s’il arrête pas de bouger, c’est pas sa faute, mais vu qu’il est assis quand il bouge, je le classe dans la catégorie des statiques). Un de ses amis vient le rejoindre vers 15 heures, lui, il fait des maths et quand il est écoeuré, il lit le journal Métro en dessous de la table (comme si je le voyais pas, tsé !). Toujours assis au même coin, il y a un vieux monsieur qui a l’air vraiment grognon et qui traduit du Russe (j'espère que je ne lui ressemblerai pas à son âge...). Je suis franchement bien entourée, mais ce sont les personnes entrant dans la catégorie dynamique qui sont les plus divertissantes. Il y a d’abord Monsieur 20 centimes, un quêteux, très propre de sa personne et poli par-dessus le marché qui se tient près des machines à café et sur le balcon où vont tous les fumeurs « Excusez-moi mademoiselle, auriez-vous une pièce de 20 centimes, s’il vous plaît?» C’est tellement bien demandé que c’est dur de lui refuser. Il y aussi un bonhomme tout droit sorti des années 1970 qui se promène toujours en camisole avec son portable sous le bras. Il marche comme ça, dans la bibliothèque, et il change de place à peu près aux heures. Bizarre. Mais le cas dynamique le plus étrange, c’est sûrement la madame du troisième étage qui parle toute seule. Elle est toujours habillée en bleu (comme le vieux vicieux...) et elle ressemble à une sorcière, toute petite et toute maigre avec des cheveux grisonnants. Elle ne s’assoit jamais. Elle reste debout dans l’allée au troisième étage, faisant les 100 pas, s’arrêtant stratégiquement devant certaines tables, son sac en bandoulière et son manteau accroché dessus et elle regarde les gens, ses bras croisés sur sa poitrine; parfois elle pose la tête dans sa main. Elle ne fait rien, elle s’est perdue, je crois. Comme j’aime bien me raconter des histoires, je me dis que derrière ses allures de Moires se profile peut-être une muse.

samedi 22 novembre 2008

La fin du chapitre sans fin

J’ai passé une grosse semaine à travailler entre 7 et 10 heures par jour sur mon never ending chapitre théorique et méthodologique. Ça m’a rendue nostalgique des fins de session du bac (oui, ça se peut) où on carbure au café, même froid, sans jamais quitter l’écran de l’ordinateur (sauf pour aller aux toilettes... le café...). Je me sentais comme dans une espèce de bulle d’abstraction intellectuelle, mais jouissive, les neurones en perpétuelle ébullition, fière de voir que j’étais encore capable de réfléchir... Je suis tout de même très partagée entre la pertinence de mes recherches et leur totale inutilité... Au fond, l’important c’est peut-être juste de savoir que je suis capable de travailler, d’articuler une pensée qui, même si elle ne change pas le monde, sera au moins raisonnée. Si j’ai de la chance, elle sera aussi raisonnable. J’ai donc envoyé les 30 et quelques pages de mon chapitre sans fin hier soir à 19 h 12 par courriel à mes deux directrices. J’ai ensuite chanté à tue-tête un vieux tube de Michel Fugain tout en touillant la sauce à poutine, denrée rare au pays du foie gras et récompense tout indiquée pour célébrer ma victoire contre la hantise rédactionnelle.

lundi 17 novembre 2008

De la télé qui ne fonctionne pas et des conséquences surréalistes qui en émanent

Quand on est déménagé dans notre appart en avril dernier, on s’est abonné au réseau Freebox (il n’y a que les appels vers le Canada qui sont free là-dedans...) parce que ça fonctionnait bien là où on habitait, avec les colocs. Sauf que, je sais pas pourquoi (le sort s’acharne sur tout ce qui requiert du courant ici... c’est la campagne...), depuis trois semaines maintenant, la télé ne fonctionne pas. Freebox (tu parles d’un nom !), c’est la PIRE affaire technologique qui ne me soit jamais arrivée. Y’a toujours quelque chose qui fonctionne pas, quand c’est pas le téléphone (déjà qu’on nous a envoyé un gros taouin qui imitait mon accent pour faire un trou dans l’mur...), c’est internet, maintenant c’est la télé (et ça fait pas longtemps qu’on a du signal, genre trois mois...) Y’a (encore) un problème de signal, ou je sais pas quoi, un problème «moderne» qui me fait dire un gros tas d’insanités et me donne juste envie de garrocher avec violence le modem par la fenêtre. La télé-qui-fonctionne-pas m’a quand même donné un bon prétexte pour lire des romans comme dans le temps (pourtant, j’avais la télé dans le temps?!?), effouarée dans le sofa, des heures et des heures, toujours un autre chapitre avant d’aller se coucher... J’ai un peu oublié la télé depuis trois semaines, mais ce matin un appel téléphonique (ça marchait ce matin) a eu tôt fait de me rappeler son existence.

Depuis qu’on est ici, c’est une ou deux fois par semaine que je reçois un appel étrange de gens qui essayent de me vendre des affaires. Je les écoute parce qu’ils sont quand même gentils et vraiment convaincants. Y’a eu la madame qui voulait me vendre du poisson congelé par la poste (!) sans engagement (!!) qui m’a vraiment marquée, et aujourd’hui, un monsieur de Neuf Box SFR, le concurrent de Freebox, qui m’a totalement traumatisée.

- Bonjour, est-ce que je peux parler à Monsieur ou Madame Morier.
- (Comme je suis fière!) Ouiiiii ! c’est mouwaaaaaaa !
- Je m’appelle Abdel, je suis représentant chez Neuf box SFR et je vous appelle concernant votre réseau téléphone-télévision-internet...
- Ouiiiii ...
- Est-ce que vous avez des problèmes avec votre connexion, votre modem ?
- (Ayoye, y lit dans ma vie, lui... méfiante, je lui réponds) Quelques fois... mais habituellement ça passe (oh, le gros mensonge)... Mais j’ai une Freebox... vous c’est Neuf Box, non ?!?
- En effet, c’est-à-dire que... vous avez bien internet à la maison ?
- Ouiiii ?!
- Quelqu’un de chez vous a consulté notre site internet, c’est donc qu’il est intéressé par nos services. C’est la raison de mon appel.
- AH BON ?! (Je rêve ou Neuf Box SFR nous espionne? J’ai eu envie de lui demander s’il savait aussi ce que je mangeais pour souper parce que tantôt j’ai googlelé «ailes de poulet BBQ»...) C’est peut-être mon mari qui a consulté votre site... Voulez-vous rappeler à 7 ... 19 heures ?!
- Bien sûr ! Aurevoouàre Madame Morier!
- Salut Abdel...

Non mais, oussé qu’on s’en va...

lundi 10 novembre 2008

Someone's knocking at the door... Somebody's ringing a bell

Ça faisait longtemps que le mal du pays n’était pas venu frapper à ma porte.

«Coucou, c’est moi!» m’a-t-il fait ce matin alors que j’observais d’un oeil craintif, une poule et sa progéniture en train d’essayer de ne pas sombrer dans les profondeurs d’un trou de bouette géant. Je lui ai alors administré une taloche dont il se souviendra longtemps, mais, prêt à tout pour rendre mon existence insignifiante, il m’a ensuite poursuivi dans la maison de façon à ce que je tourne en rond sans avoir besoin de son aide, cela en me faisant constater combien je faisais dur avec ma veste de laine de l’entre-deux guerre, que je n’étais qu’une paresseuse, bonne à rien, stupide et laide et qu’en résultait assurément l’état des lieux déplorables, misérables, infects, ainsi que mon incapacité à mener à terme un chapitre que je travaille depuis maintenant plus de 6 mois. Essoufflée, je me suis posée enfin sur quelque chose de solide, c’est-à-dire mon cul, parce qu’il n’y avait plus rien d’autre de tangible aux alentours, et l’autre m'a relancé «Quessé que tu fais ici, veux-tu bien me dire?!?» Ostie de question conne. Je trouve jamais rien à répondre. Je le sais plus ce que je fais ici, je sais plus rien, mais je passe quand même la journée à chercher la réponse, qui ne vient pas.

Le néant. La musique dans le piton, danser, jogger, fumer, boire, même un best-seller en vient pas à bout (j’ai lu Les pilliers de la Terre, quasiment d’un trait, super bon comme best-seller, la traduction est bizarre des fois, l’histoire est tirée par les cheveux, mais la construction des cathédrales du Moyen-âge, c’est passionnant). C’est un cancer, ostie.

En plus, je m'auto-interdit d'en parler, parce que je trouve que j'ai l'air de me plaindre pour rien.

...

À part l’histoire de la poule, y’a rien de vrai dans tout ça. C’est dans ma tête. Ce qui me fait capoter c’est que dans ces moments-là, y’a plus rien que la valise qui compte, la valise et moi, dedans la valise (elle est assez grande...). J’ai envie de me faxer en novembre 2007 sur la rue Jeanne-d’Arc, mais je suis trop grosse, et personne n’a encore inventé le fax-à-revenir-dans-le-temps. Tout va pour le mieux ici pourtant. Je trouve ça poche de consacrer une journée entière à délirer sur le pourquoi et le comment de mon existence au lieu de faire ce que j’ai à faire et d’en profiter. Mais je suis pas capable.

C’est rien qu’une journée... C’est la même rengaine depuis le début, mais c’est ça. Ça passe. Tchek ça, demain je m'en souviendrai même plus.

Merci de me lire et de me donner des conseils, ça décoince, sans joke (mais vous devez me trouver obstinée et têtue en «tabernacle», et Gautier, je te promets d’essayer Ricardo à la FNAC, ça fera toujours ben quelque chose à conter...)

Le degré zéro de l'inspiration

J'essaie de trouver des choses à écrire, mais rien ne vient. Tous les gens de Bonnelles hibernent alors je ne les vois plus, et il fait un temps de canard. Vu que je ne suis pas un canard, je ne sors pas. Je passe la journée à regarder mes chats et à me poser des questions sans réponses, genre «pourquoi je vis? Pourquoi je ne suis pas un chat, je ne me poserais pas cette question-là...»

Avez-vous une demande spéciale? Peut-être que ça me dégourdirait les neurones...