samedi 1 août 2009

Miron



Je veille sur un chat qui s'appelle Miron. De Gaston ou de feu les cheminées… J'ai oublié de demander. C'est un chat de lettreux : Miron le poète alors... Ses miaulements d'outre-tombe sont une plainte lancinante qui s'étire. Au plus fort du spleen, ils doivent bien atteindre les 50 décibels et brisent les cœurs, le mien entoucas. Je le sors pour fumer, mais lui ne fume jamais. Il chasse la mouche plutôt.
Je l'appelle Ti-mi. Un chat du désert. Une démarche de vampire rachitique. Il s'assoit dans un coin, prend une pose à l'égyptienne et me fixe avec ses yeux d'extra-terrestres. Il est d'ailleurs, Ti-mi, c'est certain : ses oreilles sont beaucoup trop grandes en comparaison de sa tête. Ses pas-de-moustaches donnent l'impression qu'il a été rescapé d'un incendie. Il s'avance. Je ne sais pas s'il veut que je le flatte ou s'il veut me mordre. Parfois, je ne suis qu'attaquable pour lui, une menace ou une proie, une grosse mouche qui parle, ça dépend des jours.
Car, voyez-vous, c'est le genre de chat à deux vitesses : turbo et mou. À vitesse molle, il est mignon. Il est tout petit, se roule en toute petite boule, comme quand je me réveille le matin. J'ai l'impression qu'une fragile et soyeuse exubérance a poussée dans mon cou, pendant la nuit. Parfois, il s'étend de tout son long, ses quatre pattes démesurées en l'air. Il ne bouge plus, longtemps. Puis Ti-mi me cherche, il gratte mes pantalons, veut que je le prenne dans mes bras, ce que je fais pour éviter le tourment des miaulements. Il est chaud, brûlant, bouillant, il est d'ailleurs, c'est certain. Miron.
Miron, quand il passe à la vitesse turbo, on a l'impression qu'il court sur les murs. Il prend sa position d'attaque, les pupilles dilatées et saute sur ma jambe qu'il ne lâche pas. Ce matin, je mangeais une banane debout en me faisant du café : il a attaqué la pelure qui pendait dans le vide, et ma main en l'occurrence. Je porte, depuis lundi dernier, les stigmates de sa furie.
Je ne sais pas encore si Miron est fondamentalement un chat, mais c'est sans doute la chose la plus douce que je n'ai jamais touchée de ma vie. Il me fait penser à une gargouille. Vivante.
Peut-être qu'il veille sur moi.

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